Mamie Je t'aime

Date de diffusion : 24/05/2012
Durée : 00:05:09
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Printemps des poètes

Dans le cadre de la 14e édition du Printemps des poètes, le Spacs a recueilli vos lignes poétiques sur le thème « Enfances ». Les poèmes retenus par notre jury ont été lus à haute voix par un comédien professionnel mardi 27 mars 2012. Utv vous propose de découvrir chaque midi durant le mois de mai une nouvelle poésie.

Description

Tu me prenais sur tes genoux, tu me serrais dans tes bras, tu me lisais des histoires, tu m’embrassais. Tu faisais tout cela sans compter le temps qui passait, sans voir les saisons évoluer. Tu me racontais ton histoire, la guerre et ses drames, ta jeunesse et tes rires.
Je jouais dans le jardin. Je mangeais des glaces. Je courrais et tu n’arrivais pas à me rattraper. Je montais aux arbres avec ma sœur puis t’appelais car j’étais trop haut et j’avais peur. Tout sentait la lavande et le Sud. Pieds nus, je rentrais à la maison et allais te retrouver à la cuisine : cela sentait toujours si bon…
Je m’allongeais dans l’herbe ou sur une couverture, je faisais la sieste et tu venais près de moi. Je feignais d’avoir un bobo pour avoir un câlin ou un simple baiser. Je savais que je n’avais pas besoin de faire cette comédie, mais je savais aussi que tu n’y croyais pas mais m’embrasser quand même. Nous jouions à cache-cache entre les arbres, tu faisais celle qui ne me voyais pas alors je sortais de ma cachette et te faisais peur. J’étais naïve. Et nous rigolions !
Tu rouspétais à table quand quelque ’chose n’était pas parfait, tu râlais car le poulet mettais trop de temps à cuire et que le vin et les jus de fruits allaient réchauffer. Tu criais quand le Soleil se cachait et qu’il se mettait à pleuvoir. Je me bouchais les oreilles, mais, au fond, c’était bien agréable comme bruit.
Et puis un jour, j’ai grandi. Nous ne courrions plus ensemble car tu étais trop vieille pour cela et que j’étais maintenant une jeune fille, alors, je te faisais des bracelets brésiliens ou des scoubidous. Je restais à l’intérieur de la maison car il faisait trop chaud pour aller lire dehors. Nous restions ensemble à discuter. Tes histoires étaient les mêmes, mais je les écoutais toujours avec passion. Tes anecdotes ne changeaient pas mais tu pensais que c’était la première fois que tu me les disais, alors je faisais celle qui les découvrait. Les rôles, quelque part, s’étaient inversés : c’était à mon tour de faire semblant.
Il n’y avait plus vraiment la même odeur dans la cuisine, tu faisais des plats plus simples, moins fatiguant, je t’aidais à mettre la table. C’était à ton tour de faire la sieste. Je restais près de toi. Je te regardais dormir, paisiblement.
Et puis il y a eu ce lit d’hôpital où tu reposais. Tu semblais tranquille. Ton visage était paisible. Ta joue froide a reçu mon dernier baiser. Des larmes coulaient le longs des mes joues. Je ne pouvais plus parler. Tu ne serais plus jamais là, à mes côtés. Tu es partie vers Dieu le jour où celui-ci nous a donné son fils. Une étoile est apparue dans le ciel. A présent, tu me regardes de là-haut. Plus rien de seras jamais plus comme avant. Je ne cours plus dans ton jardin et la cuisine n’a plus la même odeur, pourtant, j’y entends encore ta voix et les bruits de casseroles. L’odeur de lavande s’estompe peu-à-peu… la poussière s’installe sur les meubles. Grand-père est seul. Tu restes dans mon cœur Mamie.
Ce jour-là, sans m’en apercevoir, j’ai grandi. J’ai pleuré mais j’ai souris en repensant à toi. A ces histoires qu’enfant tu me lisais… ‘Ciboulot et Ciboulette font des carabistouilles’, c’était mon livre préféré…tu me le lisais avec tellement de charme que j’en rigole encore.
Dans quelques jours, j’aurais 23 ans. Je suis devenue une adulte, mais mon cœur n’a pas changé, je reste ta petite fille. Je garde mon âme et mon sourire d’enfant. Je m’assoie et je te parle. Je regarde les étoiles et je pense à toi. Je ferme les yeux et me remémore tous ses souvenirs. Tu as marqué ma vie pour l’infini. Tu m’as fait grandir au fil des ans. Je suis devenue une jeune femme grâce à toi et je ne te remercierai jamais assez. J’espère que tu seras fière de moi. Même si, au fond, j’ai toujours mon cœur d’enfant.

Aurélie Gicquel

Mot(s)-Clé(s)  

poésie